Plongez dans l’univers musical « Made in Franck » d’un jeune homme d’aujourd’hui qui ressort de son sac en coton bio des titres d’hier, de maintenant ou de demain. Un océan de notes où se mêlent récits à la première personne et photographies d’un instant, d’une époque, le tout en chanson. Cette semaine, immersion en apnée avec Niagara, ou comment devenir mythique.
Comme beaucoup d’enfants issus des années 80, j’aurais aimé être déjà adolescent pendant cette décennie colorée et libérée. Je me serais vu grimé en Boy George traînant au sous-sol du Rose Bonbon aux débuts d’Indochine en 1982. Et à l’heure où la bande à Sirkis partait « à la recherche de l’ombre jaune » dans « L’Aventurier », un autre groupe de rock qui s’ignorait encore à ce moment-là, allait changer de nom quelques années plus tard, passant de « L’Ombre Jaune » à « Niagara ».
Septembre 1985. Muriel Moreno et Daniel Chenevez (le duo-couple qui forme Niagara) noient la France entière avec leur premier single « Tchiki Boum ». Une chanson maquillée aux airs faciles et niais –comme on en faisant à l’époque- mais qui lançait en fait une déclaration d’amour au public et au final une prophétie pour le groupe : « Mais de toi je ferai ce que je voudrais ». Gros succès. Deuxième single, mai 1986 : « L’amour à la plage ». Chanson de l’été à tout jamais. La déferlante Niagara est en route. S’en suit un premier album « Encore un dernier baiser » et un tsunami de tubes.
Comme beaucoup d’adultes d’aujourd’hui, entendre le nom de Niagara me faisait sourire, repensant à ces deux vieux cartons kitchs qui sentent la poussière et les boites à rythme. Mais alors, pourquoi les citait-on encore tellement comme référence, et pourquoi n’étaient-ils pas tombés dans l’oubli comme Eli Medeiros (que j’adore !) ou Desireless (pardon) ?
Pour comprendre Niagara, il faut lire entre les lignes des paroles toutes écrites par sa chanteuse. Qui dit couple dit amour, qui dit amour dit passion, et qui dit passion dit souffrance. Derrière cette légèreté et ce large sourire que l’on entend à l’oreille, se cachaient des textes mélancoliques, presque tristes. « Pendant que les champs brûlent, j’attends que mes larmes viennent ». A la façon des Rita Mitsouko qui nous font danser encore à chaque soirée sur une histoire de cancer, Muriel peignait son quotidien sur fond d’onirisme et d’ésotérisme. « Viens plonger dans l’oubli et le rêve. Parle-moi, parle-moi d’amour… » 10 ans de carrière, 4 albums. Et quand le duo sort son ultime best of « Flammes » en 2002, ce ne sont pas moins de 18 titres que l’on prend plaisir à (re)découvrir. 20 ans après leurs débuts, je suis encore en boucle. Comme glacé sur les pochettes de leurs disques, leurs chansons n’ont pas pris une ride. Leur style a évolué crescendo aux rythmes des succès, comme leur couple y est allé décroissant. Si leur premier effort peut être vu comme cucu-la-praline, c’est un vrai groupe de rock français qui s’est révélé. Surtout à partir de 1990 avec la sortie de la galette « Religion » et le tube « J’ai vu » aux riffs presque « métal ». Le duo montre qu’il ne se laissera pas noyer par les années 80. Deux ans plus tard parait « La Vérité », une nouvelle et dernière vague de Niagara qui surfe toujours autant sur le succès. Ils sont même le premier groupe à se voir sponsoriser par MTV Europe.
« Si le ciel ne me tombe pas sur la tête, si la lune a comme un air de fête, si la neige ne font pas au printemps » et si en concert Muriel se révélait en une bête de scène, une vraie rock star aux cheveux rouges et aux tenues légères, en coulisses (et en Suède) la femme de Daniel devient aphone. La tournée européenne est annulée. Il avait les idées ; elle l’aimait. Il pensait ses tenues, réalisait les clips. Elle (ne) s’exprimait (qu’)à travers ses textes. « Je ne suis pas de celle que tu ensorcèles. Je me rebelle, et si tu me décèles je me ferai la belle ». Après une tournée quasi-mondiale et un tout dernier concert non annoncé comme tel dans le Sud de la France, Niagara tombe. Les fans retiennent leur souffle, en apnée. Depuis, le groupe n’a jamais refait surface. « Mais je dois m’en aller, je ne veux plus t’aimer ».
On ne sort pas indemne des années 80. Soit on est catalogué « tube de l’époque » et on fait la tournée nostalgique des clubs de province (je ne citerai aucun nom), soit on traverse les décennies (voire les siècles) et on continue d’exister comme l’ont réussi certains groupes déjà cités. Pour rester mythique et entrer dans la légende des groupes de rock façon Téléphone, Niagara a stoppé les éclaboussures dorées de sa fontaine de jouvence avant sa propre chute, en pleine gloire. Daniel fait toujours de la musique, Muriel a sorti quelques albums solo -mais sans photos- et joue la Djette occasionnelle. Quant à moi, j’écoute toujours les vinyles intacts de Niagara dans ma chambre et je me déguise en Boy George à l’abri du regard des voisins… « Peut-être la vie est-elle encore belle ».
Texte : Julien Franck / Photos : Mickael Komer
Et de toi je ferai ce que je voudrai x2
et si tu prends mon corps…
tcha tcha tcha
Enorme ! Merci d’avoir rendu hommage à l’un des meilleurs groupes pop rock français des années 80 et 90.
J’adorais Niagara !!!!
NIAGARA….Groupe incontournable des années 80 avec les RITA et LUNA PARKER…. Muriel Dacq dansant et chantant sur TCHIKI BOUM et L’AMOUR A LA PLAGE…Ah le TOP 50!
Waouh; très bien écrit… MERCI
Au niveau visuel, il s’occupait des video et elle s’occupait de son look vestimentaire, et ensemble, ils écrivaient musique et paroles. C’est ce qu’ils disent dans une entrevue chez Sonia Benezra (1993).
« Je n’oublierai jamais le moment où tu es parti
Je donnerai ce que j’ai pour que tu reviennes ici… »…qu’ils reviennent les Niags…
J’avais 19 ans en 1985. J’ai vu toutes leurs tournées, serré leurs mains après un concert, bu leur musique jusqu’à plus soif et je les aime toujours autant…Niagara fait incontestablement partie de ce que la musique française a produit de meilleur.
Trop peu de disques hélas…
Le meilleur groupe français de tous les temps. Tellement dommage que Muriel ait craqué.
Pauvre Daniel, en perdant Muriel il a perdu son âme. Elle était le côté émotionnel du groupe et Daniel savait tellement la mettre en valeur et lui donner une forme. Je suis sûr que Muriel était sa source d’inspiration.
Le meilleur groupe français de tous les temps. Tellement dommage que Muriel ait craqué.
Pauvre Daniel, en perdant Muriel il a perdu son âme. Elle était le côté émotionnel du groupe et Daniel savait tellement la mettre en valeur et lui donner une forme. Je suis sûr que Muriel était sa source d’inspiration.
Très jolie analyse! Merci
Merci Franck pour ce magnifique commentaire qui illustre parfaitement Niagara.(petit rectificatif: il écrivaient paroles et chansons ensemble)Ils m’ont fait danser pe enfant des années, et Muriel, qu’elle splendeur!
Super commentaire sur Niagara, Merci!!!