Frédéric Brulhatour : « La radio est un média qui doit ressembler à ses auditeurs »

1001 idées pour réussir à la radio

Coulissesmédias : vous êtes l’auteur de « 1001 idées pour réussir à la radio ». Comment est né ce livre ?

Frédéric Brulhatour : J’avais rédigé quelques fiches pratiques sur les techniques d’interview. Je les ai compilées et je me suis aperçu que le sujet était quasiment inépuisable et surtout qu’il suscitait une vraie curiosité de la part de mes confrères. Même si certains d’entre eux se vantaient d’avoir plusieurs années de pratique radio, c’était la première fois qu’ils avaient accès à des écrits qui concernaient leur profession. J’ai donc décidé d’en faire un livre. Philippe Chapot le patron des Editions HF a trouvé l’idée très originale. Il a pris immédiatement la décision de publier « 1001 idées pour réussir la radio ».

Coulissesmédias : Il s’agit d’un guide qui comporte de nombreux conseils et astuces pour aider celles et ceux qui souhaitent faire de la radio, leur métier. C’est encore indispensable aujourd’hui, ce genre de manuel ?

Frédéric Brulhatour : « 1001  idées  pour  réussir  à  la  radio »  est  le  seul  ouvrage  écrit en  langue  francophone  qui  traite  des  techniques  radiophoniques  et  qui  offre  ainsi  une approche  concrète  de  la  radio  et  de  ses  différents  métiers.  Il  a  le  mérite  de  rappeler les  règles,  les  bases  et  les  fondamentaux  du  média  radio.  A  ce  titre,  il  est  certainement indispensable  puisqu’il  est  le  seul  à  proposer  ce  contenu.  Je  dirai  qu’il  est  aussi  un  bon complément  à  la  pratique  quotidienne  de  la  radio  ainsi  qu’un  excellent  complément  aux étudiants

Coulissesmédias : Petite particularité, ce livre s’adresse aussi bien aux débutants qu’aux professionnels…

Frédéric Brulhatour : Oui. C’est une des particularités de « 1001 Idées pour réussir à la radio ». Il s’adresse à celles et ceux qui souhaitent faire de la radio ou qui souhaitent travailler dans une station en tant que commercial, standardiste, chroniqueur ou programmateur. L’ouvrage compile un panorama de toutes les techniques liées à l’animation et au journalisme. Pour les professionnels, le contenu offre un rappel des fondamentaux de la radio. Une sorte de piqûre de rappel… J’ai voulu un ouvrage au style direct et accessible par tous, une bible de la radio riche de quelque 200 pages. Particularité : il est préfacé par Guy Banville, l’un des meilleurs consultants radio de la planète.

Coulissesmédias : Vous êtes vous-même animateur radio ?

Frédéric Brulhatour : J’ai débuté la radio comme animateur bénévole à l’âge 14 ans. Journaliste est ma profession. J’ai à peu près fait tout ce dont il est possible de faire dans une radio : chroniqueur, animateur de flux, programmation musical, standardiste, reporter, présentateur… et comme tout le monde beaucoup d’erreurs qui ont été le déclencheur de cet ouvrage. J’ai bientôt 40 ans et j’avoue être toujours autant passionné et curieux.

Coulissesmédias : Que constatez-vous le plus souvent lorsque vous écoutez les animateurs ?

Frédéric Brulhatour : Un manque évident de préparation des interventions. Peu d’originalité dans les propos. Des carences qui conduisent logiquement à une aseptisation des programmes et du rendu de l’antenne. Beaucoup d’animateurs s’écoutent parler et vivent sur des acquis ou sur des automatismes. Il y a de très bons animateurs mais ceux qui possèdent toutes les qualités requises sont rares. C’est une des raisons qui expliquent le faible taux de renouvellement des personnalités de la radio.

Coulissesmédias : En quelques mots, donnez-nous les clés pour qu’un jeune animateur qui se lance réussisse son entrée dans le métier…

Frédéric Brulhatour : Les jeunes animateurs ont trop tendance à prendre comme modèles leurs confrères qui évoluent sur des antennes Top 40 alors que le rôle d’un animateur ne se limite pas à l’animation d’un simple flux musical. Réussir son entrée dans le métier est un travail quotidien : travail d’écriture, de recherche d’info, travail de la voix, d’angle et de contenu de speaks, écoute de pige… Il faut faire preuve de beaucoup d’humilité, être capable d’accepter la critique et se remettre en cause le plus souvent possible. Cette entrée dans le métier s’inscrit sur du long terme. Il est nécessaire d’être d’abord un apprenti comme dans tous les autres métiers. Une fois le cap franchi des cinq années de pratique, la vie d’animateur débute. Et il y a peu de places à prendre…

Coulissesmédias : Quelle est votre priorité dans ce livre ?

Frédéric Brulhatour : Donner envie aux curieux ou aux passionnés de mettre le pied à l’étrier. Faire comprendre aux animateurs et aux journalistes qu’ils exercent un métier formidable. Métier qui exige indiscutablement un très important travail. Et surtout mettre le doigt là où ça fait mal : les mauvais automatismes, les phrases toutes-faites… Bref, le manque de créativité. L’animateur qui arrive cinq minutes seulement avant la prise d’antenne n’existe pas ou ne dure pas. Le journaliste capable de sortir un scoop par jour non plus. Rien n’est simple dans une radio.

Coulissesmédias : Vous abordez tout ce qui fait la radio d’aujourd’hui en insistant aussi sur la préparation des différents programmes d’une grille. Vous évoquez aussi bien « le voice track » que la libre-antenne mais aussi la météo et la technique d’interview…

Frédéric Brulhatour : Oui. Je pense n’avoir rien oublié ! Même si « 1001 idées pour réussir à la radio » n’a pas la vocation d’être exhaustif dans son contenu. Chacun y trouvera ce qu’il y cherche. Et pour ma part, je peux vous assurer qu’il y a encore d’autres sujets à aborder. Une suite est bien sûr envisageable. Nous avons évoqué cette possibilité avec Philippe Chapot. Mais dans l’immédiat, nous avons fait le choix de travailler sur d’autres supports : le site idradio.fr est régulièrement mis à jour avec un contenu unique en prolongement de l’ouvrage. Le nouveau magazine bimensuel « La Lettre Pro de la Radio » propose également des sujets dans la même veine. Les gens de la radio veulent des conseils, des cas d’école… On leur en donne et travaillons sur d’autres projets.

Coulissesmédias : La question que beaucoup de monde se pose : quelle formation un animateur ou un journaliste doit-il avoir pour faire ses premiers pas en radio ?

Frédéric Brulhatour : Tout le monde doit pouvoir faire de la radio. Faire ses premiers pas à la radio, en tant que bénévole par exemple, est encore possible mais cela est de plus en compliqué. La radio est un média qui doit ressembler à ses auditeurs. Je pense que ceux qui fabriquent la radio doivent être aussi des auditeurs pour mieux transmettre leur message. Dire qu’il faut une formation particulière est exagéré. La radio est également faite par des gens qui n’ont jamais étudié dans une école. Ils ne sont pas formatés. Mais le passage par une école, avec des professionnels exigeants et possédant un savoir-faire, est devenu une priorité.

Coulissesmédias : Vous abordez beaucoup le travail en radio locale dans ce livre. Est-ce que le métier se veut différent par rapport à une radio nationale où les enjeux ne sont évidement pas les mêmes ?

Frédéric Brulhatour : Le travail en radio locale est un palier nécessaire avant d’intégrer un réseau multifréquences ou une tête de réseau. Je pense que les enjeux sur une antenne locale ou nationale sont identiques : divertir et informer, certes un public différent, en mettant tout en œuvre pour que sa station génère de l’audience, des recettes publicitaires et s’inscrive dans la durée.

Coulissesmédias : Et puis, vous dressez un état des lieux des radios associatives…

Frédéric Brulhatour : Parce que le paysage radiophonique français est particulier. Particulier puisqu’il accueille plusieurs centaines de radios dites associatives. Elles sont souvent un tremplin pour les grands noms de la radio. Elles proposent des programmes originaux qu’il est impossible d’écouter ailleurs. Il est néanmoins nécessaire qu’elles se professionnalisent davantage si elles veulent continuer à demeurer cette exception française.

Coulissesmédias : Votre livre reprend des techniques qui sont la plupart du temps enseignées dans des écoles spécialisées. Vous allez leur faire de l’ombre…

Frédéric Brulhatour : Bien au contraire. « 1001 idées pour réussir à la radio » est un excellent complément aux matières enseignées dans ces écoles. Au lycée ou en faculté, les élèves disposent de manuels scolaires ou universitaires. Dans ces écoles, très rares sont les supports écrits qui offrent un prolongement à la théorie avant d’aborder la redoutable pratique. C’est pourquoi certains de ces établissements n’hésitent pas à recommander mon ouvrage en complément des stages, des cours et des formations. Ils ont jugé l’ouvrage comme très complémentaire.

Coulissesmédias : Vous êtes « pour » ou « contre » ces écoles ?

Frédéric Brulhatour : Pour, bien sûr ! Animateur, programmateur, journaliste, chroniqueur… sont de vrais métiers. Je suis admiratif des responsables de ces écoles qui font le pari de former des jeunes et de leur transmettre leur passion. Dans les années 80 et 90, ces établissements ont terriblement manqué à celles et ceux qui, comme moi, voulaient se lancer dans ces métiers. Mon seul souhait est que ces écoles ne formatent pas ces générations et qu’elles laissent s’exprimer la créativité des élèves pour donner naissance aux talents de demain.

Entretien de Mickaël ROIX.